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Travailler dans le métavers : révolution ou désillusion ?

Alors que la crise sanitaire a démocratisé le travail hybride, essentiellement pour les cadres du secteur des services, l’émergence de la version 3.0 d’internet compte révolutionner nos manières de travailler et notre rapport au travail. Si le métavers reste un outil marginalement utilisé qui nécessite d’être perfectionné et popularisé, il a déjà un pied dans le monde du travail. Alors, quels en sont les atouts et les enjeux ?

Les prémisses du métavers comme nouvel espace de travail

Le métavers est un concept encore flou mais qui se veut être un espace de réalité virtuelle immersif et actif qui permet à la fois d’interagir avec les personnes et l’environnement.  

Propulsé sur le devant de la scène par Mark Zuckerberg et son ambition d’en faire l’axe de développement majeur de son groupe Meta, le métavers n’est pas si récent. Apparu en 1992 sous la plume de Neal Stephenson, le métavers représentait un monde parallèle accessible par un casque. De la fiction au réel, ces casques désormais commercialisés sont la condition pour y accéder. 

L’utilisation du métavers dans le monde du travail permettrait aux membres d’une équipe, installés à distance ou présents au bureau, d’évoluer ensemble dans leur entreprise virtuelle avec des avatars à leur effigie ou par holoportation. La proximité physique ne serait plus une nécessité pour pouvoir discuter avec ses collègues à la machine à café ou pour participer à des réunions. Par ailleurs, le métavers propose des bureaux dynamiques adaptables aux tâches à effectuer au long de la journée. 

Alors que Meta propose de télécharger la version bêta de son espace de travail virtuel et que Microsoft offre des expériences de collaboration en réalité mixte, le métavers pénètre le monde du travail, à la marge certes, mais l’emballement médiatique confirme l’intérêt pour cette innovation.

 

Le métavers pour un télétravail plus efficace

La pandémie a donné un coup d’accélérateur aux technologies de télétravail, qui permettent d’abolir les barrières géographiques et de travailler en équipe à distance. Alors qu’un salarié sur cinq en France est concerné par le télétravail, quelques avant-gardistes se sont essayés au métavers. Il permettrait selon eux de combiner les avantages du télétravail et du présentiel : pouvoir rester chez soi et bénéficier d’un équilibre vie pro – vie perso, limiter les trajets et gagner du temps, tout en travaillant directement avec son équipe dans un monde virtuel partagé, de façon plus interactive et inclusive. 

Travailler dans le métavers pourrait ainsi palier les conséquences néfastes du télétravail sur le travail d’équipe, le lien social et la culture d’entreprise, tout en pérennisant l’organisation hybride du travail. 

Par exemple, la holoportation qui désigne la reconstitution 3D d’une personne partout dans le monde et en temps réel est une technique de communication qui répond au besoin de préserver le lien tout en étant à distance. 

L’expérience immersive du métavers permet d’ores et déjà de former des collaborateurs à l’aide d’éléments visuels qui s’adaptent à l’environnement réel, de donner des cours à distance comme dans une réelle salle de classe, de tester différents modèles de packaging pour un produit sans avoir à les fabriquer réellement, d’organiser une opération de sécurité dans une ville à partir d’un plan en 3D, ou encore de former les étudiants à la pratique de la chirurgie.  

Le métavers est donc utile dans différents corps de métiers. Meta cible par exemple les architectes, designers et autres créateurs pour lesquels cet outil serait un réel atout business en termes d’efficacité, d’expérience collaborateur et même d’expérience client. 

 

Une technologie à perfectionner pour répondre aux attentes des travailleurs et aux défis contemporains  

Néanmoins, le métavers n’est pas encore capable de proposer une expérience au moins aussi agréable que celle d’une organisation classique. 

Des chercheurs de l’université de sciences appliquées de Coburg en Allemagne ont observé dans une étude les limites du travail dans le métavers en confrontant la réalité technologique actuelle aux promesses faites par les acteurs et fervents promoteurs de la réalité virtuelle. 

Champ de vision plus restreint, définition des écrans inférieure à ce que les yeux humains perçoivent, fatigue visuelle, migraines, anxiété, sentiment de frustration, productivité accrue sur un temps court mais bien moindre sur le temps long sont les effets rapportés par les “cobayes” de l’expérience suite à une semaine de bureau virtuel.

Quant aux collaborateurs de Meta, incités à travailler dans le métavers qu’ils ont conçu, ils sont eux-mêmes relativement insatisfaits de l’état actuel de l’outil. 

Ainsi, le manque d’ergonomie est un frein à l’adhésion au métavers dans ces premières expériences. Pour espérer se démocratiser, cette technologie devra faire des progrès pour répondre aux attentes des travailleurs. 

Au-delà du besoin de perfectionnement, le métavers serait un outil à adopter de façon progressive et ponctuelle afin d’éviter toute surcharge de réalité virtuelle et de s’adapter à cette nouvelle façon de travailler. 

Il faudra enfin cerner les problèmes éthiques, juridiques, environnementaux et sanitaires intrinsèquement liés l’utilisation du métavers : 

Quel encadrement juridique des plateformes, du droit du travail et de la protection des données ? Quel mode de rémunération ? Comment concilier cette révolution technologique avec les préoccupations environnementales ? Comment préserver la qualité de vie au travail, la santé mentale et le droit à la déconnexion ? Pas applicable à certains corps de métiers, comment éviter la création d’une fracture entre les travailleurs du monde réel et du monde virtuel ? 

Toutes ces interrogations démontrent que le métavers n’est pas encore assez mature. S’il peut constituer une révolution pour le monde du travail, l’adopter demandera un temps certain de familiarisation avec les nouvelles manières de travailler et de collaborer, et nécessitera de trouver un équilibre entre vie réelle et vie virtuelle. 

 

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