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Sommet de l’inclusion économique : bienfaits et méthodes

Le premier Sommet de l’inclusion économique s’est tenu le 29 Novembre 2021, organisé par la Fondation Mozaïk. Réunissant de nombreux intervenants parmi lesquels des décideurs d’entreprises mais aussi des membres du gouvernement, cet évènement a été l’occasion de mettre en avant l’objectif d’un monde du travail inclusif. Où en est l’inclusion aujourd’hui ? Qu’apporte-t-elle à l’entreprise et comment la développer ? Éléments de réponse. 

Etat des lieux de l’inclusion en France

Le Sommet a débuté avec un discours de Bruno Le Maire dans lequel le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, a rappelé l’importance du travail pour l’inclusion dans la société tout en précisant que “l’inclusion passe par des emplois dignes et bien rémunérés”. “On ne mesure pas à quel point les petits détails font parfois l’exclusion, et c’est aussi des petits détails qui feront l’inclusion” a-t-il déclaré, montrant par-là que les efforts requis sont minimes mais peuvent faire toute la différence entre une entreprise discriminante et une entreprise inclusive. Thione Niang, Afro-Américain d’origine sénégalaise ayant participé aux campagnes présidentielles de Barack Obama, s’est ensuite exprimé pour signifier que la France est un pays avec de nombreuses opportunités, des opportunités qui doivent s’ouvrir à tous et ne pas concerner qu’une poignée de Français.  

Pour la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, Elisabeth Borne, les progrès en matière d’inclusion en entreprise sont encore aujourd’hui trop lents. La législation protège des dérives discriminatoires mais ne parvient pas à mettre la France au niveau des pays européens sur ce sujet. Or, pour la ministre, la France ne peut pas se permettre de laisser une partie de sa population en dehors de l’activité économique, d’autant plus que les pénuries de main d’œuvre sont aujourd’hui nombreuses. Il existe plusieurs résistances difficiles à surmonter dans la mesure où ils ne sont pas toujours clairement identifiables. Ces biais sont souvent introduits par le CV qui apparaît comme une source de discrimination. Par ailleurs, comme le rappelle Eric Delannoy, Président-fondateur de Tenzing Conseil, l’inclusion a un coût, un coût financier, pour former, et un coût culturel puisqu’il s’agit de sortir d’un “entre-soi” confortable. Mais ces coûts sont selon lui moindres par rapport à tout ce que peut apporter l’inclusion en matière d’impact financier et culturel 

L’inclusion comme facteur de performance et de cohésion sociale  

En moyenne, les entreprises inclusives sont 19% plus innovantes que les autres a indiqué Muriel Jasor, cheffe de rédaction aux Echos. Chez Suez, cela se constate concrètement : depuis que l’entreprise s’est engagée pour l’inclusion, elle recrute moins de hauts-diplômés mais le turn-over a également diminué et la productivité est en hausse. Preuve que l’envie des salariés surpassent les attitudes et les aptitudes ! Par ailleurs, accueillir des profils diversifiés ne suffit pas, l’inclusion recouvre de nombreuses étapes : le recrutement, l’accueil, les formations et l’évolution du salarié au quotidien dans l’entreprise. Pour Emmanuel Deschamps, CEO chez Boulanger, la diversité en entreprise est un enjeu de dignité humaine et de respect. L’entreprise a une forte responsabilité car, l’emploi étant le premier vecteur d’intégration sociale, elle conditionne en partie l’inclusivité de la société. Les jeunes actifs l’ont bien compris, intégrer une entreprise qui aspire à transformer le monde conformément à leurs valeurs compte plus aujourd’hui pour eux qu’intégrer une entreprise qui leur propose un salaire confortable. Pour cette raison, Fabienne Dulac, CEO d’Orange, considère que les jeunes représentent une “génération nativement inclusive”.  

Dépasser le CV pour inclure

L’une des étapes cruciales pour la diversité et l’inclusion en entreprise concerne le recrutement, de la publication de l’offre à l’entretien d’embauche. Par exemple, pour diffuser ses offres à un maximum de candidats potentiels, Marie Barsacq, directrice Impact et Héritage Paris 2024, s’est appuyée sur une centaine d’associations réparties partout sur le territoire. L’organisme, qui a prévu de passer de 650 salariés aujourd’hui à 4 000 en 2023, tente également de nouvelles méthodes de recrutement via des job dating autour du sport afin d’analyser les soft skills : recruteurs et candidats se réunissent anonymement autour de tournois sportifs le temps d’une journée. Ainsi, Impact et Héritage Paris 2024 souhaite pouvoir recruter sans CV, ce qui est le cas de plus en plus d’entreprises. En effet, le CV, que ce soit par autocensure ou simplement parce qu’il est limité, ne permet pas d’identifier toutes les compétences d’un candidat. Or, pour Philippe Grassaud, Président d’Eduservices, les soft skills comptent bien plus que les diplômes car la technique s’apprend facilement, pas le savoir-être.

Sur ce sujet, Gilles Gateau, directeur général de l’Apec, observe un paradoxe concernant les tranches d’âges les plus concernées par le chômage, à savoir les jeunes et les actifs seniors : les jeunes ont en général beaucoup de techniques et peu de soft skills tandis que les seniors ont de nombreux soft skills mais une technique souvent plus faible. Valoriser les soft skilss reviendrait alors à se montrer plus inclusif face aux inégalités sociales, économiques et donc intergénérationnelles. De son côté, Indeed tente de développer le recrutement sans CV auprès de 7 millions de candidats qui pourront, dès lors qu’une annonce les intéresse, rencontrer des recruteurs directement en visioconférence. Ce mode de recrutement a fait ses preuves : 95% de taux de satisfaction pour les demandeurs d’emplois et 75% pour les recruteurs. Toutefois, comme l’a rappelé Stéphanie Mouligneau, DRH de Picard, le recrutement sans CV n’est pas possible pour certains métiers qui nécessitent des techniques particulières ce qui implique que des postes sont moins ouverts à la diversité. 

Rendre son entreprise inclusive au quotidien 

Plusieurs mesures expérimentées ont été détaillées par les décideurs du Sommet de l’Inclusion parmi lesquelles : 

  • Développer un mentorat interne pour accompagner le nouveau salarié dans son acclimatation à l’entreprise tout en créant très tôt un lien social entre les salariés. 
  • Créer un indice de diversité de l’entreprise permettant de constater les efforts faits et à faire. Sur ce sujet, la ministre du Travail souhaite imposer un taux de 30% d’emploi féminin dans les entreprises d’ici environ 5 ans, et monter par la suite le taux pour atteindre une juste parité. Pour l’entreprise, mesurer et se fixer des objectifs lui permettra de progresser en la matière.  
  • Former l’ensemble des salariés de l’entreprises, y compris les managers, aux enjeux de discrimination et aux comportements inclusifs. L’inclusivité des salariés est essentielle car les équipes sont les premières à accueillir les nouveaux salariés.  
  • Développer l’alternance pour permettre à des jeunes d’avoir une première expérience professionnelle dans le milieu. En effet, si l’alternant apprend, l’entreprise et ses salariés apprennent parfois tout autant à son contact, ils développent ainsi une culture inclusive. 
  • Développer de réels parcours d’intégration avec des formations, des séminaires mais aussi des tests des produits de l’entreprise lorsque cela est possible.  
  • Insuffler une culture inclusive au quotidien aux salariés, aux manageurs et aux responsables des ressources humaines, via des affiches, conférences et formations régulières.  
  • Dépasser les “réseaux d’anciens” qui, même s’ils permettent d’assurer des emplois pour certaines personnes, sont excluants pour de nombreux autres candidats.  
  • Organiser des rencontres très tôt avec des jeunes pour dépasser les biais de l’éducation. Par exemple, alors que les femmes représentent environ 20% des ingénieurs en France, organiser des conférences dès le collège permettrait d’attirer plus d’étudiantes par la suite vers ces métiers.  
  • Privilégier les compétences réelles, la mise en action du savoir-faire, aux diplômes. 

Ces mesures précèdent cependant 2 étapes importantes : la volonté et le recrutement. La volonté car, comme le dit Laurent de Cock, Directeur des Ressources Humaines d’Accenture, l’inclusion en entreprise est avant tout une question de volonté. Si l’entreprise en fait véritablement une de ses priorités, elle saura trouver facilement et avec peu d’effort les moyens pour la mettre en place. 

 

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