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La disruption et ses effets sur l’emploi

La plateforme Up Conférences organisait le 3 mai un débat sur l’avenir du travail. D’ici quelques années, le travail va connaître de profondes mutations avec l’émergence des travailleurs indépendants et l’automatisation de nombreux métiers. A quoi ressemblera-t-il après l’avènement des plateformes et de l’automatisation ? C’était l’objet des discussions à la Bellevilloise, où s’est tenue la conférence nommé « Disruption à bon emploi ».

Le développement décevant des plateformes collaboratives

 « L’économie collaborative n’existe plus », lâche Arthur de Grave, rédacteur chez OuiShare. Il y évoque ses désillusions sur la capacité de l’économie collaborative à faire émerger autre chose que quelques grosses plateformes commerciales (AirBnb, Blablacar…).
Pour Vincent Huguet, fondateur de HopWork, une plateforme de recherche de freelance, la trajectoire de l’économie collaborative est comparable à l’histoire d’Internet : très libertaire et non-marchand à ses débuts, avant de s’intégrer progressivement à l’économie capitaliste.  « Aujourd’hui, des chambres sur Airbnb sont au même prix que les hôtels dans certaines villes« , constate Benoît Thieulin, membre du Conseil du Numérique. Il reconnaît cependant le « progrès de service » apporté par ces plateformes qui permettent de se déplacer et de se loger facilement.

De plus en plus de travailleurs indépendants

On note d’ailleurs que l’émergence de ces plateformes coïncide avec une augmentation du nombre de travailleurs indépendants, ces « freelance » qui ne sont pas employés par une entreprise, mais payés directement par des clients auxquels ils fournissent leurs prestations. Ces nouveaux travailleurs représentent 1/3 des travailleurs aux Etats-Unis, et 10% en France, un chiffre en constante augmentation.

Cela veut-il dire que le modèle du salariat est obsolète et appelé à disparaître ? Aucun des intervenants ne croît à ce scénario. Les intervenants semblent plutôt imaginer qu’un modèle hybride se développera, dans lequel le salariat cohabiterait avec une proportion croissante de travailleurs indépendants. Mais l’augmentation du nombre de freelance pose aussi de nombreuses questions rappelle Benoît Thieulin. « La protection sociale n’est pas faite pour ça. Il va falloir s’adapter pour que les freelance  soient mieux protégés. » Il faudra également trouver des solutions pour ceux qui cumuleront l’emploi salarié et le travail en freelance, par exemple « des gens qui travaillent à mi-temps pour garder le statut  de salarié, et font du freelance à côté avec des revenus plus aléatoires ».

Une automatisation des jobs de la classe moyenne

Une tendance bien plus lourde que l’émergence des plateformes et des freelance risque de changer le travail en profondeur : l’automatisation.

Publiée par l’université d’Oxford en 2013, une étude estime que 47% des emplois actuels aux Etats-Unis sont susceptibles d’être automatisés.  « On s’apprête à vivre une vague d’automatisation qui est sans précédent,  et incomparable avec celle  des années 70-80, prévient Benoît Thieulin.  Là, c’est des cols blancs qu’on va remplacer. C’est le centre de la société, la classe moyenne et moyenne supérieure, qui va être touché. » Arthur de Grave corrobore ses propos. « On est dans l’automatisation de tâches à forte valeur cognitive« , explique-t-il en prenant l’exemple d’algorithmes prédictifs qui pourront produire de meilleurs diagnostics qu’un médecin.

Vers un revenu universel de base ?

Tous les participants s’accordent à dire que des destructions d’emplois s’opéreront. La question est plutôt de savoir si elles seront compensées par assez de créations d’emplois dans de nouveaux métiers du numérique. 

La question du revenu de base va donc devenir inévitable, estiment Arthur de Grave et Benoït Thieulin, tous deux favorables à ce dispositif. Selon Benoit Thieulin, c’est une manière de reconnaître l’impossibilité du plein emploi, de lisser les revenus aléatoires des travailleurs indépendants, mais aussi d’aider ceux qui souhaitent s’engager dans des activités bénévoles au service de la société, car leur action deviendra cruciale. « Il ne faut pas imaginer que les prochains grands progrès sociaux seront faits via des politiques publiques de masse, comme l’éducation, la santé, les retraites. On sent qu’on arrive à la limite de ça. Les prochains progrès sociaux majeurs viendront des gens qui se rendent service entre eux. Avec la plateformisation, vous allez pouvoir trouver une personne à aider ou qui va vous aider, où vous voulez et quand vous voulez. »

D’après les propos recueillis par Les Clés de Demain, lors du débat  de UpConférence « Disruption à bon emploi ».

> A lire : l’article complet par Les Clés de Demain sur la conférence

> A visiter : le site de UpConférence

> A lire : l’article de la Fondation Travailler Autrement sur le rapport du Conseil National du Numérique sur l’influence du numérique sur l’emploi

> A savoir : « Disruptif », « agile »: bienvenue dans la novlangue du monde du travail ( AFP)